Quand les GAFAM dictent la régulation de l'IA.
- francknegro1900
- 1 sept. 2024
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Dernière mise à jour : 18 sept.
Dans une tribune publiée par Le Monde, le philosophe et théologien autrichien Peter G. Kirchschläger, professeur d’éthique théologique et directeur de l’Institut social USE à l’Université de Lucerne, dénonce la place prépondérante accordée aux grandes entreprises de la Tech dans le processus d’élaboration et de régulation de la transformation numérique impulsée par l’intelligence artificielle. Il invite les responsables politiques, notamment ceux de l’Union européenne, à accorder davantage de poids aux autres parties prenantes, "y compris les organisations de la société civile". Selon lui, il existe un risque réel de voir les politiques publiques de l’innovation technologique s’orienter de manière biaisée, en faveur des seuls intérêts de quelques multinationales.
Kirchschläger cite en premier lieu Meta (Facebook), Alphabet (Google), Amazon, Apple et Microsoft, qui sont régulièrement conviées "à la table des négociations" par les décideurs politiques, en particulier européens, alors même que ces entreprises ont montré, écrit-il, "une volonté effrontée de créer des outils dangereux et de nuire aux utilisateurs au nom de la maximisation des profits". Le philosophe rappelle, à ce titre, plusieurs enjeux majeurs de l’éthique des technologies numériques : le risque d’aggravation des inégalités, la consommation énergétique massive, l’absence de garanties suffisantes en matière de sécurité des données et de protection contre la surveillance, ainsi que les menaces de désinformation et de manipulation politique ou économique liées à l’usage croissant des plateformes numériques.
Pour illustrer son propos, l’auteur avance une analogie saisissante : c’est comme si les responsables politiques européens invitaient les membres de cartels de la drogue et du crime organisé à participer à la conception et à la mise en œuvre de mesures destinées à lutter contre la criminalité organisée et le trafic de stupéfiants. Sans prôner l’exclusion des grandes entreprises privées du débat sur l’avenir des technologies, Kirchschläger appelle néanmoins à une prise de distance critique de la part des décideurs politiques et à une meilleure intégration des autres acteurs concernés, afin d’éviter que les géants de la Tech ne soient les seuls à "orienter la réglementation des plateformes numériques et des applications émergentes de l’IA".

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